Rencontre avec La Cueilleuse Sauvage : « Nous sommes relié.e.s depuis toujours aux plantes, c’est grâce à elles que nous sommes en vie aujourd’hui »
Vous avez peut-être déjà vu ses photographies féériques de plantes sauvages sur Instagram. Marine y tient le compte La cueilleuse sauvage, où elle documente son activité d’herboriste, empreinte de poésie et de douceur. Depuis quelques mois, elle propose des déambulations en ligne à celles et ceux qui veulent découvrir le monde végétal, sa beauté magique et son pouvoir de guérison. La prochaine aura lieu ce dimanche 28 mars pour célébrer l’arrivée du printemps. Ce grand entretien nous plonge dans l’univers d’une femme reliée, par le corps et l’esprit, aux secrets de la nature.
Quel rapport entretiens-tu aux plantes ?
Je suis une grande amoureuse des plantes sauvages, et ce depuis toute petite. Avant d’habiter en pleine nature, je lisais déjà beaucoup de livres sur les plantes. Mon rêve était de travailler avec elles. Lorsque je vivais en ville, j’allais les cueillir lors de balades en forêt, mais mon rapport à elles était surtout intellectuel. J’avais du mal à me connecter à leur présence dans un environnement naturel. C’est depuis que je vis dans une oliveraie près des montagnes que j’ai développé une approche plus sensorielle des plantes. J’aime l’idée de les rencontrer et de cohabiter avec elles.
Comment la beauté de la nature te soigne-t-elle ?
Dans ma vie personnelle, je me soigne beaucoup par la beauté. C’est une façon de me guérir et de m’inspirer. Dans mes déambulations, je donne à voir la beauté de la nature. Elles commencent toujours par une méditation. C’est un état d’ouverture du cœur à l’émerveillement, c’est-à-dire à notre capacité à nous laisser émouvoir par la beauté des plantes. Ainsi, on peut recevoir ce qu’elles ont à nous transmettre. Leurs détails, leurs mouvements font naître des images qui nous renvoient à notre humanité. C’est par cette approche poétique que l’on accède aux bienfaits des plantes sauvages.
Comment est née ton activité de cueilleuse sauvage ?
J’envisageais de faire de la production, mais ce n’était pas dans ma personnalité de travailler les plantes de cette manière. Ce rôle de transmission correspond mieux à mes multiples passions : la photographie, la vidéo, l’écriture. J’alimente ma pratique par des savoirs en astrologie, mythologie, alchimie et bien sûr, botanique. Les schémas professionnels classiques ont tendance à gommer cette multiplicité des facettes de nos êtres, j’ai conscience de la chance que j’ai d’avoir pu créer une activité aussi enrichissante et variée.
Concrètement, en quoi consistent tes déambulations ?
Je choisis plusieurs plantes pour chaque session, selon la médecine de chaque saison. Après un temps méditatif, j’entre ensuite dans le détail de leurs propriétés et je propose des soins et des recettes. À l’origine, elles ont lieu chez moi, mais avec le contexte je les ai adaptées en ligne. Cela m’a conduit à renforcer la dimension poétique de l’expérience que je propose. J’explore de nouvelles façons de transmettre cet univers sensible et les participants sont au rendez-vous, j’en suis très reconnaissante. Un nouveau cycle de déambulations sera lancé au printemps.
Qui te suit ?
J’ai un public très varié, autant de passionnés que de néophytes en mal de nature. On n’a pas besoin d’être en permanence en contact avec la nature, ou d’ingérer tous les jours des plantes pour être liées à elles. Dans mes déambulations, j’invoque la beauté des plantes et je transmets une reliance qui dépasse la seule présence physique. Le résultat est surprenant. En invoquant une plante dans notre imaginaire, on peut recevoir sa médecine, sa guidance.
Comment se rapprocher des plantes quand on les connaît peu ?
Je propose toujours de faire attention à celles qui nous appellent. Sans connaître son nom ou ses propriétés, on peut déjà se rendre disponible à notre ressenti en présence d’une plante sauvage. Nous sommes reliés depuis toujours aux plantes, c’est grâce à elles que nous sommes en vie aujourd’hui. Elles nous ont nourris, vêtus, permis de construire nos maisons. L’humanité a une relation intime à la nature qu’il est possible de retrouver en soi. On peut ensuite se renseigner, approfondir son savoir en continuant cet aller-retour entre le ressenti et l’apprentissage. Une rencontre approfondie avec quatre à cinq plantes vaut mieux qu’une connaissance vaste de centaines d’espèces végétales. Sans cela, on peut se demander si la médecine de la plante opérera.
La cuisine est-elle un bon moyen d’aller vers les plantes ?
Nos modes de vie actuels sont marqués par un appauvrissement sensoriel. La cuisine permet de se réapproprier notre sensualité, par le toucher, le goût, les parfums. D’autres activités le permettent aussi, comme la danse. C’est pourquoi je collabore avec la danseuse Clémentine Antier et d’autres femmes dont les activités créent des ponts vers le monde végétal. Ces co-créations nous nourrissent mutuellement et ouvrent de nouvelles voies d’exploration de la nature.
Tu revendiques une démarche éco-féministe. Qu’est-ce que ça signifie ?
Il s’agit de mettre en parallèle l’exploitation de la terre et celle du corps féminin. L’histoire a prouvé qu’il existe des liens entre la domination des ressources naturelles et l’oppression des femmes. Être éco-féministe, c’est revendiquer une écoute réciproque avec la nature et le féminin en nous, dans le respect de chacun. C’est développer un autre rapport à soi, aux autres et à la terre. Dans la phytothérapie actuelle, on utilise trop souvent les plantes à des fins utilitaristes et individualistes. Je soutiens une phytothérapie respectueuse du végétal qui tisse des relations réciproques avec les plantes.
Comment la crise que nous vivons accroît-elle notre besoin de nature ?
Je ressens chez les participantes de mes déambulations un besoin de beauté, de retrouver cet émerveillement, mais aussi de créer des relations au-delà du monde humain. La crise que nous vivons est liée à l’anthropocentrisme de nos sociétés, nous devons changer de regard sur le monde qui nous entoure. La nature est un guide pour traverser les crises, trouver des réponses et se décentrer.
Et si vous ouvriez votre cœur au printemps ? Dimanche 28 mars, La cueilleuse sauvage propose une déambulation pour s’émerveiller au contact des plantes de la nouvelle saison. Inscriptions ici.